something decadent
[read aloud in English at eeeeh! in nyon 05.05.23]
Je m'étais convaincu que je faisais de l'auto-portrait pour me permettre de mourir petit bout par petit bout, au lieu de tout d'un coup. C'était la période où je lisais Sur la photographie de Sontag pour la première fois. Je l'ai lu en traduction française, parce que c'était ce que j'avais trouvé en librairie à Paris. J'avais du coup assez mal compris. Par exemple, je n’avais même pas considéré qu'elle pourrait cracher sur la photo. Pour moi, ce qu'elle disait sur la photo et la mort était générateur, libérateur. Je me suis mis à essayer de déplacer ma douleur sur l'image - de la faire capturer, la confiner dans ses bords. L’autoportrait devient une manière de se faire mal sans se blesser physiquement, une manière d'extérioriser ces cicatrices, en faire quelque chose qui pourrait être rangée sous le lit, hors de ma vue.
Un an plus tard, lors de mon premier jury en école d'art, on me demande pourquoi je fais de l'autoportrait. Sur le coup, je ne sais pas répondre. Quoi dire ? Je pense beaucoup à la mort, je ne sais pas si je dors pas parce que je pense à la mort ou si je pense à la mort parce que je ne dors pas, et dans ce noeud d'insomnie et d'obsession j'ai découvert l'interstice de la photo argentique, interstice dans lequel s'enfuir, trouver du repos dans l'activité répétitive, continuer de vivre.
Heureusement que je n'ai pas dit ça. Dans l'école d'art, on ne croit pas à l'art comme activité thérapeutique. Il faut produire des objets qui viennent de soi, bien sûr, mais pas pour se guérir, il faut juste rendre ses blessures visibles aux autres, les rendre consommables, les présenter sous forme critiquable.
J'ai lancé donc tout un travail de recherche sur l'autoportrait photographique. Je suis tombé sur un courant de pensée féministe de l'image, dont je n'ai retenu qu'une notion, que l'autoportrait serait une manière de transformer la linéarité de l’action photographique, où l'on peut tracer une ligne droite entre photographe, appareil, et sujet, en boucle, parce que la photographe et le sujet ne font qu'un. Je me suis beaucoup appuyé sur cette notion, allant jusqu'à concevoir la prise de vue comme une action performative qui prend le dessus sur l'image en elle-même.
Deuxième jury, ça ne marche pas non plus, enfin personne ne comprend, j'ai l'impression, et je commence à reformuler entièrement l'encadrement théorique de mon travail argentique. Je ne mentionne presque plus l'autoportrait. Je parle de matérialité, de l'objet de l'appareil photo, de processus, de chimie. Au bout d'un moment, j'arrête carrément de faire de la photo.
Dans le creux de production suivant la fin de ma formation, je réfléchis beaucoup à ce que j'aime dans l'art. Je n'aime pas l'art qui me dit comment je devrais me sentir, qui raconte trop. Je dis maintenant, et je sais pas si c'est vrai, ou juste une histoire que je me raconte, mais je dis que je suis attiré par l'art que je déteste, ou que je ne comprends pas. Dans ces deux cas, je suis obligé de m'inventer des histoires. Bien sûr, j'ai beaucoup de mal à en faire moi même. J'aime bien expliquer les choses, j'aime bien que l'on ne déteste pas ce que je fais. Donc pendant longtemps je ne faisais rien. Ou plutôt, j'écrivais, juste. Et là, maintenant, c'est la première fois que je mets à l'épreuve ce sur quoi j'écrivais.
[soft pause]
If critics art and art critiques then life performs and performance arts and I won't criticize nor circumscribe or delimit. Cuz the work is real enough for me, or rather, this is real enough for work, and we all know why we're here tonight.
I'm scared of my onstage persona, a shy monster who lives for the violent non-sequitur. The dark dank creature beyond the fourth wall, proof of my most debased proclivities, and really, I've farted in too many red velvet seats to take this seriously. And this is why I wrote the first part in French, to read it in English, because when I write in English I cling to the taste of words in my mouth, silly words like 'proclivities,' that remind me of fried-yellow hills, of the smell of your arms, of wrenching heartbreak and warm silences. Shaking water out of your ears, the sound rushes back. Apparently some people don't understand that colors can be too loud. Escaping into the chasm between here and now, encircling by embrace: what is the point of its viewing, the viewpoint of pointing, or the view of the point? Double down on the downturned doubles. Pour cherry kirsch into chocolate margerine. Jeer pungent trolls. Define pudding's scintilla. The crust is stratum. From dusk's blood you forge them. The heat is seething, cups your waist. Slip into the sybaritic cavity of the dessert. Roars through the crumb of vanilla. Undulates into touch. She must sup in art as if dreaming. Crying in the dutchess of lead vanity, eating the cake of the midnight lock melted to room temperature. She continues cum-busting. One cherry ball in the center of the tongue. The crashing of all that was distant. The ending of dizzy profundity & chalices of sorrow. Sprouted fronds. All the land chained to the sky. Cruel mirror oozes. Something decadent and far, far away.